Biodiversité et tourisme durable :
comment relever les défis de la transformation ?
Au lendemain de la crise sanitaire qui a fortement affecté le secteur, à quels risques environnementaux le tourisme doit-il faire face ? Et dans quelle mesure nos écosystèmes naturels et leur diversité représentent-ils des opportunités pour son développement ?
Avec les nombreux débats climatiques autour du voyage en avion, un nombre croissant de touristes recherchent des moyens de se déplacer moins impactants sur l’environnement et aspirent à découvrir les régions qui les entourent. La crise du Covid a accéléré cette tendance, et y a apporté une dimension supplémentaire, celle du besoin de se reconnecter à son environnement naturel.
Cette prise de conscience est d’autant plus marquée chez les jeunes générations, qui incarnent le tourisme de demain. Le secteur touristique n’a d’autre choix que de s’adapter à cette nouvelle donne, dans laquelle la biodiversité occupe une place centrale. Pour la France, première destination touristique mondiale, les enjeux sont élevés.
Au lendemain de la crise sanitaire qui a fortement affecté le secteur, à quels risques environnementaux le tourisme doit-il faire face ? Et dans quelle mesure nos écosystèmes naturels et leur diversité représentent-ils des opportunités pour son développement ?
Le tourisme, générateur d’impacts sur la biodiversité
Au travers de l’étendue des métiers auxquels il fait appel, le tourisme constitue un important contributeur du réchauffement climatique à l’échelle mondiale. En France, il est responsable de 11 % des émissions de gaz à effet de serre, lesquelles participent de façon notable à l’érosion de la biodiversité. Même si le facteur climatique est souvent le plus souligné, les effets du tourisme sur la biodiversité se déclinent sous d’autres formes.
A l’échelle globale, le premier facteur de pression sur les écosystèmes naturels est le changement d’usage des terres et mers. Le tourisme n’y fait pas exception, au travers par exemple de la construction d’infrastructures de transport, de lieux de restauration, d’hébergement et de loisirs, ainsi que par la surfréquentation des sites naturels.
A ces impacts viennent s’ajouter les pollutions liées aux activités des touristes, associées notamment à leurs déplacements ou à leurs déchets, mais aussi les pollutions sonores et lumineuses qui viennent perturber les écosystèmes alentours.
Par ailleurs, les consommations importantes d’eau induites par les activités touristiques, à l’image des stations de ski (production de neige de culture) ou les parcs aquatiques (pertes par débordements et par évaporation), constituent des sources de pression sur les ressources naturelles, donc sur la biodiversité.
Enfin, l’équilibre des écosystèmes vivants est vulnérable à l’introduction, volontaire ou accidentelle, d’espèces exotiques envahissantes dans des milieux naturels qui leur sont favorables. Elles rentrent alors en compétition avec les espèces indigènes et dégradent très souvent les milieux qu’elles ont colonisés.
Ainsi, le tourisme tel qu’on le connaît aujourd’hui contribue de manière significative aux cinq grands facteurs d’érosion de la biodiversité que sont le changement d’usage des terres et mers, la surexploitation des ressources naturelles, le changement climatique, les pollutions et l’introduction d’espèces invasives.
La saisonnalité de l’activité touristique constitue un facteur aggravant son effet sur les écosystèmes. En plus d’être localisés sur certains espaces, les impacts générés sont très concentrés dans le temps. Au-delà de l’effet d’empiètement qui peut ainsi s’avérer critique dans les zones les plus fréquentées, la construction d’infrastructures d’accueil des touristes est généralement surdimensionnée. Par exemple, l’offre d’hébergement est réfléchie pour accueillir autant d’hôtes que possible en pleine saison, et les logements restent vides le reste de l’année. Il existe donc un véritable enjeu sur une meilleure répartition des flux sur les quatre saisons.
Le tourisme, un secteur très dépendant des services écosystémiques
Dans le même temps, le tourisme est fortement tributaire des écosystèmes naturels, qui au-delà de leur attractivité propre vis-à-vis des visiteurs, offrent des services d’approvisionnement, de régulation et culturels sans lesquels le secteur ne pourrait survivre. Les phénomènes de submersion marine dans les stations littorales, de baisse du niveau des eaux de navigation liée aux sécheresses, de raréfaction de l’enneigement et de fonte des glaciers en montagne, sont autant d’exemples de ces facteurs de dépendances du secteur vis-à-vis de la biodiversité.
Ainsi, la diversité et le bon fonctionnement des écosystèmes sont indispensables au maintien de la diversité des offres touristiques en France et dans le monde. Leur bon fonctionnement est gage de qualité et de durabilité des activités qui en dépendent. L’illustration ci-dessous donne un aperçu de la diversité des offres touristiques permises par les écosystèmes :
Les activités les plus à risques
Le tourisme est un vaste secteur, dont toutes les composantes ne sont pas exposées aux mêmes niveaux de risques, à la fois en termes d’impacts que de dépendances vis-à-vis de la biodiversité. Le graphique ci-dessous présente l’impact potentiel et la dépendance à l’état écologique des écosystèmes d’une quarantaine de pratiques touristiques communes.
Les activités les plus dépendantes de la bonne santé des écosystèmes sont les plus menacées par l’érosion de ces derniers. Ainsi, des activités de pleine nature telles que la randonnée, la plongée sous-marine ou l’accrobranche sont particulièrement touchées par la dégradation de l’environnement en général.
A noter que les destinations touristiques ne sont pas exposées de la même façon aux effets du changement climatique, en fonction de leur contexte biogéographique. Les zones côtières, les villes peu végétalisées et les zones de montagnes reposant principalement sur le tourisme alpin sont particulièrement exposées aux dangers climatiques.
Quelles perspectives pour le tourisme de demain ?
Aussi, le passage à un tourisme plus durable apparaît comme une priorité majeure, en particulier à l’échelle de la France, dont la richesse et la variété des paysages, gages d’attractivité de ses destinations touristiques, sont intimement liées à la diversité de nos écosystèmes.
Le tourisme durable est une des cibles identifiées au sein de l’Objectif de Développement Durable (ODD) n°8 de l’ONU « Travail décent et croissance économique », dont la cible 8.9 prévoit, d’ici à 2030, d’« élaborer et mettre en œuvre des politiques visant à développer un tourisme durable qui crée des emplois et mette en valeur la culture et les produits locaux ».
Par ailleurs, en France, les pouvoirs publics se sont déjà saisis de la question et ont amorcé une transition vers un tourisme plus durable. Porté par le Ministère de la Transition Ecologique sur la période 2022-2024, le plan « Destination France » a vocation à conforter et renforcer le leadership de la France comme première destination mondiale de tourisme durable, en limitant notamment ses impacts sur le changement climatique et l’érosion de la biodiversité.
L’exemple des aires protégées en soutien à un modèle touristique vertueux
A titre d’illustration concrète, et comme l’explique CDC Biodiversité, les aires protégées représentent un vecteur potentiellement très prometteur de la transition écologique du secteur touristique. Les aires protégées peuvent en effet être l’objet d’une approche doublement bénéfique : elles permettent en effet de préserver des écosystèmes menacés par le tourisme tout en constituant un levier de sensibilisation des visiteurs, projetant ainsi le tourisme comme vecteur d’impact positif et de préservation de la biodiversité. La figure ci-dessous donne un exemple de flux financiers générés par un modèle touristique intégrant pleinement les aires protégées.
Cette figure illustre les bénéfices économiques que le tourisme peut retirer des services écosystémiques offerts par les aires protégées. Celles-ci peuvent être à la base de nouvelles offres touristiques et donc contribuer à développer le secteur. Dans ce modèle, le coût des infrastructures et les frais de gestion sont supportés en partie par le gouvernement, mais aussi par les entreprises, via des financements obligatoires (taxes, normes, impôts) ou volontaires (actions de mécénat). En retour, les aires protégées contribuent à l’emploi local.
De multiples opportunités en lien avec la biodiversité
Plus largement, des actions de préservation des zones identifiées comme les plus menacées sont à entreprendre au plus vite. La conservation du littoral, la renaturation de domaines skiables, ou encore la création d’îlots de fraîcheur en ville apparaissent ainsi comme des axes à privilégier.
Comme mentionné plus haut, le rééquilibrage des flux touristiques entre les saisons est également une piste de réflexion majeure : le développement du tourisme quatre saisons est un levier important à mobiliser pour préserver les écosystèmes et atténuer les pressions que les activités humaines exercent sur eux.
Acteur du tourisme, vous souhaitez en savoir plus sur vos impacts et dépendances à la biodiversité et explorer vos leviers d’actions ? N’hésitez pas à faire appel à nous !